L'Archipel du Dingue

Capitaine du Space Mountain Messages : 2092 Age : 29

Le silence était toujours aussi présent, et la situation dans un état de suspens pouvant presque mal à l'aise. Alors que Sarah et Heatran se mettaient aux aguets, le visage d'Harold, où qu'il fut et quel qu’il fut, était en pleine transe, en pleine méditation, alors qu'il avait les yeux fermés. Rien ne semblait pouvoir le déranger en cet instant. De temps en temps, l'homme ressentait un véritable état second, comme-ci on lui aspirait toute son énergie, toute sa chaire, tout son sang. Chaque fois que cette sensation surgissait, l'homme Tengalice se sentait un peu plus faible, mais d'un autre côté, il se sentait sur le coup plein d'adrénaline, presque fiévreux, comme un drogué au moment où il assouvissait une énième fois son addiction. Restant calme, le Lieutenant Stalker se mît à penser pour lui-même, sa voix résonnant dans ce qui semblait être un monde intérieur.

*En définitive, tu as vraiment tout faux, Heatran... Défouler ta haine dès qu'elle te monte à la tête comme tu le fais, ce n'est pas une solution. Cela ne peut que te ronger, te faire faire des erreurs stupides, perdre la raison, détruire ce que tu apprécies... Et je parle d'expérience. Si tu fais face à une telle haine, tu dois l'accumuler, la garder en toi, l'enfouir dans un placard, comme une arme que tu garderais "au cas où". Et le jour où tu tombes sur la véritable source de ta haine, avec une occasion de la détruire...*

La fièvre fut particulièrement chaude ce coup-ci, l'aspiration étant plus forte que les précédentes. Harold ouvrit brutalement les yeux.

*... Tu relâches toute cette haine d'un coup.*

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Sarah et Heatran étaient particulièrement prudents. Ils n'avaient pas fait l'erreur de sous-estimer leur adversaire, ni de se relâcher au moment inopportun. Et pourtant... Rien n'aurait pu préparé à ce qui allait leur arriver, tellement ceci défiait toute expectation. En un instant, alors que la femme Arcanin était en train de prendre une plus grande bouffée que d'habitude de sa cigarette, le tabac de celle-ci provoqua une véritable explosion de cendres encore brûlantes dans sa bouche, comme-ci un courant d'air vif et puissant avait surgi de l'intérieur de la cigarette. Sarah s'enfuma, ses poumons se remplirent de cendres, son palet et le fond de sa gorge brûlèrent, l'étouffant complètement. Une voix se mît alors à lui chuchoter à l'oreille, comme-ci c'était un courant d'air qui avait glissé cette fois au creux de celle-ci.

"Je t'ai déjà dit il y a longtemps que tu devrais arrêter de fumer, chérie."

A peine cette phrase fut-elle finie, un immense tronc d'arbre asséchée se souleva violemment du sol et fonça sur Sarah, alors que celle-ci était encore ravagée par sa propre clope de l'intérieur, le tronc frappant avec force dans son dos au point de sa craquer en deux. Avant que Heatran ne puisse réagir, une immense tornade commença à apparaître là où se trouvaient les deux GIjinkas, des débris de roche volant dans tous les sens alors qu'un peu plus loin à côté du Légendaire Déchu, une partie de sa lave se soulevait dans les airs en tourbillonnant. Des débris de roche volcanique vinrent s'y fixer, formant petit à petite une silhouette qui grossissait au fur et à mesure, avant de former finalement un nouvel Harold à peine discernable composée totalement de lave et de roche, deux lumières jaunes extrêmement brillantes semblant définir ses yeux alors qu'un écho de voix semblait émaner de la forme.

"Je... commence... à m'habituer... Puisque tu ne peux pas gérer ta haine correctement, Heatran... Je vais te montrer... comment on fait."

La forme de magma projeta ce qui semblait être l'un de ses bras vers la femme Arcanin, et le dit bras devint une immense colonne de lave qui s'étendit à toute vitesse sur la Rebelle sans lui laisser la moindre chance de répit, la détermination du Kentucky à l'éliminer ne faisant alors plus aucun doute.

Sarah écarquilla les yeux en entendant la voix d'Harold tandis que la fumée et les braises de sa clope la brûlaient de l'intérieur. Cet homme... Il était DANS sa cigarette ? Ou alors... Il était partout ? Dans les deux cas, c'était dérangeant. Cependant, elle n'avait pas le temps d'y réfléchir. Un arbre la frappait déjà de plein fouet, prenant feu suite à la chaleur de son dos et s'éclatant en débris qui se consumèrent sur le champ. Le femme-Arcanin fut néanmoins propulsée vers l'avant, son dos en vrac et surtout ses cendres continuant à la faire tousser et à la brûler en même temps. Elle sentit alors une main qui s'était posée sur son dos. Une main douce et chaude. La chaleur de la cigarette cessa complétement, ses brûlures internes semblant disparaître alors qu'elle crachait enfin le fameux mégot. Elle se releva et retourna la tête pour voir Heatran, l'air calme et impassible. Sa peau, auparavant parfaite, était maintenant craquelée et rocailleuse au niveau de la paume de la main qu'il avait utilisé pour soigner Sarah. La Rebelle eut l'air surprise, ne s'attendant visiblement pas à ce qu'il l'aide autant. Elle lui sourit et le remercia, mais son sourire s'effaça dès qu'elle aperçut le nouveau "corps" d'Harold. Du moins, si on pouvait appeler cela un corps... Visiblement, ce n'était plus qu'un amas de débris animé par l'âme du Stalker. Le teint de la jeune femme se fît plus pâle, alors que ses pupilles tremblaient de rage. Sans même qu'elle ne s'en rende compte, elle se mordit les lèvres au point de saigner.

De son côté, Heatran acquiesçait tranquillement, l'air songeur, en entendant les paroles de l'ancien homme-Tengalice.

-Me montrer comment gérer ma haine... Comme tu es prétentieux, Harold Metto.

Il leva alors son bras droit vers la colonne de lave qui fonçait vers eux et ferma son poing, la lave se figeant tout d'un coup, ne devenant plus que de la roche qui se fissura et s'effondra au sol, tout comme la lave dans le corps du Stalker qui durcit aussi. En même temps, tout le bras et une partie de l'épaule du Déchu se couvrit de croûtes et de plaque rocheuse, de la lave en sortant petit à petit tandis qu'un rictus de douleur et de haine défigurait son visage.

Pourtant, sa haine n'était rien. Non, elle n'était rien face au visage haineux et désespéré de la femme-Arcanin. Elle qui avait su rester calme face à cet homme détestable montrait maintenant toute l'étendue de sa haine à travers ses pupilles révulsés et ses mains tremblantes. Elle sentit des larmes

-Harold... HAROOOOOOOLD MEEEETTOOOOOOOOOO ! PAUVRE FOU ! Voilà ce que tu fais de ton corps ! Voilà ce que tu fais de notre passé, de nos idéaux, de l'enseignement que nous avons reçu ! TU ME DEGOUTES HAROLD !

Elle fit quelques pas vers le nouveau "corps" d'Harold, se disant qu'elle ne pourrait jamais considéré cela comme un corps. Qu'elle avait définitivement perdu cet homme et qu'il s'était lui-même perdu.

-Le Maître m'avait bien dis que tu ne lui avais pas donné de nouvelles depuis longtemps... Mais je ne pensai pas que tu irais aussi loin... Comment est-ce que tu en es arrivé là ? Comment... Est-ce que nous en sommes arrivé là ? Hein... Harold ?

Sarah était arrivée sur une île très éloignée de son archipel natal. Elle avait été épuisée par le voyage mais surtout par une nuit troublée par de nombreuses questions qu'elle se posait depuis longtemps. Ses parents lui en parlaient depuis toute petite. Ils lui avaient promis que cette école ferait d'elle une puissant guerrière mais aussi une fine diplomate, respectée dans le monde politique et militaire en général. Une vingtaines d'élèves y rentraient par génération, tout au plus. En y repensant, c'était peut-être le professeur le plus sélectif au monde. Elle arriva devant une immense bâtisse, un beau bâtiment en pierres taillées devant lequel l'attendait un homme. Celui-ci était fortement âgé avec une cicatrice impressionnante qui l'empêchait d'ouvrir son oeil droit. La jeune fille-Caninos fut prise d'un léger frisson, n'étant visiblement pas habituée à ce genre de spectacle. Aux côté de cet homme imposant se trouvait un jeune Pifeuil. En y regardant de plus près, il était plutôt mignon, mais elle était plutôt préoccupé par le bâtiment qui lui faisait face. Ils entrèrent dans un grand hall richement décoré, et la jeune femme ne put s'empêcher de demander, l'air émerveillé :

-C'est donc ici que j'aurais cours et que je vivrais pendant les prochaines années ?

Le vieillard parut un peu étonné et déclara d'une voix bien plus douce que ce à quoi l'adolescente s'attendait :

-Bien sûr que non ! Ce que vous voyez n'est que... La face apparente de l'iceberg, si je puis me le permettre. Des personnes aussi importantes que vous deux méritent une éducation d'exception. C'est votre futur professeur qui vous a choisit en personne.

Ils finirent de traverser le hall pour entrer dans un grand ascenseur. Au lieu d'appuyer sur un des boutons, le vieil homme passa un badge devant un capteur et une lueur dorée indiqua que ce dernier avait bien réagit face au badge, l'ascenseur commençant à descendre sous terre pendant un long moment. Lorsque les portes s'ouvrirent, c'était pour dévoiler un autre hall tout à fait différent, à l'apparence bien plus austère. Les salles avaient l'air d'avoir été creusées à même la roche et sans l'utilisation de la moindre machine. Sarah put deviner alors qu'une toute autre école se cachait sous la première, elle avait cependant l'air très déçue. Elle fit une légère moue et déclara :

-Mais il fait froid et c'est tout moche ici, vous êtes sûr que c'est le bon endroit ? L'autre école avait l'air bien plus prestigieuse !

L'homme sembla prêt à répondre quelque chose, l'air à la fois gêné et choqué, mais il fut interrompu par un puissant rire, à la fois doux et fort, ancien et rafraichissant.

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??? : Voilà bien les paroles d'une jeune noble qui fait face pour la première fois à ce que c'est qu'un véritable temple du savoir. Là-haut, tu passeras ta vie à croire que tu es la meilleure, ici-bas tu deviendras la meilleure version de toi-même. Là haut tu ne te soucieras que de ton apparence, ici tu te soucieras de l'équilibre entre ton esprit et ton corps, entre l'harmonie et le chaos qui bouillonne en chacun de nous...

Tout à coup, sans qu'il n'y ait aucun mouvement ou changement d'aura dans la pièce, un homme en armure dorée apparut dans la pièce. Son dos était voilé par une vieille cape qui avait due être blanche autrefois mais qui était maintenant sale et rapiécée. Son visage était caché par un masque d'homme-Munja, pourtant Sarah et Harold pouvaient sentir une profonde sagesse et une pointe de malice dans son... Regard ? Ou du moins dans ce qui s'en apparentait. Il releva lentement la tête et, en un instant, changea de position pour pointer les deux adolescents du doigt :

-Tel est votre destin, Sarah Eneronia et Harold Metto... Car moi, le fondateur, directeur et professeur de cette école, Genkishi Shibusen, vous ait choisi pour devenir des disciples de Rensha !

Sarah fut réveillée par une musique assez douce qui était diffusé dans tout l'internat par des hauts-parleurs. Enfin, si on pouvait parler d'internat. Genkishi n'avait qu'une vingtaine d'élèves et ils vivaient avec lui et William, le vieil homme qui l'avait menée ici. Chacun avait sa chambre et une musique sonnait d'abord à cinq heures du matin pour réveiller les élèves puis à 6h pour leur indiquer qu'ils pouvaient se rendre dans le réfectoire pour manger ensemble. Sarah poussa un profond soupir, n'étant toujours pas habituée à se lever aussi tôt. Elle grogna et tenta de se rendormir, lorsqu'elle remarqua tout à coup qu'il s'agissait de la sonnerie du petit déjeuner et non de celle du réveil. Ce qui signifiait qu'elle n'avait pas le temps de se préparer et, fait plus grave, qu'elle avait loupée les exercices du matin.

-Oh non, Genkishi va encore me faire la leçon avec ses proverbes bidons...

Elle se précipita pour se préparer et sortir de sa chambre et eut un sursaut de frayeur lorsqu'elle ouvrit la porte et s'aperçut que l'homme-Munja l'attendait déjà devant sa chambre. Avec la vitesse du précepteur, il était impossible de savoir s'il était apparut au moment où elle avait ouvert la porte où s'il était là depuis longtemps. Impossible de sentir sa présence de toute façon. Pas d'aura. Pas de signe vitaux. Pas de respiration. Il était juste là, debout, immobile comme une statue. Il y avait quelque chose chez lui qui mettait la jeune Caninos terriblement mal à l'aise. Peut-être même qu'il la dégoûtait, quelque part. Il n'avait juste pas l'air en vie. En un instant, l'armure dorée changea de position, son masque ayant pris une apparence énervée, il pointait maintenant l'adolescente du doigt.

-Mademoiselle Enorenia, est-ce que vous pensez vraiment que les exercices matinaux sont facultatifs ? C'est votre troisième absence cette semaine ! Et on est mercredi." Un esprit sain dans un corps sain..."

-"... Tel est l'Equilibre que nous souhaitons former", ça va, je sais... Mais c'est vraiment trop tôt cinq heures du matin M'sieur Shibusen... Six heures de sommeil par nuit c'est clairement pas suffisant...

L'homme-Munja changea à nouveau de position, son masque prenant une apparence interloquée, presque choquée, tandis que sa main semblait gratter son heaume d'un air gêné.

-Vraiment, ce n'est pas assez ? On m'avait déjà dis il y a longtemps que quatre heures ce n'était pas assez alors j'ai rajouté deux heures de sommeil mais... Comme personne n'ose se plaindre et que je ne dors plus depuis des années j'ai du mal à juger... Hm. Je prendrais cela en considération. Préparez-vous et allez manger avec les autres, William va bientôt servir le déjeuner.

Le Précepteur disparut aussi vite qu'il était venu. Sarah poussa un profond soupir. Elle ne s'attendait pas à ça quand ses parents lui avaient dit toute sa vie qu'elle rejoindrait une école d'élite. Tout était simple et sans faste en bas, alors que les élèves d'en haut avaient l'air d'avoir la belle vie dans une belle école. Ici, il n'y avait que le strict minimum. Ça la changeait clairement du manoir de ses parents. Elle haussa les épaules et s'avança vers le réfectoire. Sous terre, les sols et les murs étaient froids et humide. L'ambiance ne lui plaisait définitivement pas ; elle avait l'impression que tout le budget était passé dans le dojo. Elle soupira à nouveau et fut intriguée en voyant William passer par une porte au fond de l'école qu'elle n'avait jamais remarqué. Elle fit quelques pas, discrètement, pour s'approcher et y vit un signe étrange, comme un croisement entre une lune et un soleil. Sans qu'elle ne sache pourquoi, elle sentit une envie ardente de s'approcher et d'entrer dans cette pièce.

??? : Tiens, Sarah, je sais que tu as l'habitude de sécher l'entraînement mais il ne me semble pas que tu aies déjà loupé le déjeuner.

La voix fût suivie d'un puissant bâillement. Sarah se retourna pour apercevoir un autre disciple de Rensha, un homme-Roigada, grand et fin, à l'air noble et serein.

-Haha, désolé Émile, tu as bien raison. Je te suis, on est sûrement les derniers !

Ils entrèrent ensemble dans un grand réfectoire où se trouvaient plusieurs tables et des bancs en bois. Tout le mobilier était en bois et chaque pièce semblait être creusée à même la pierre. Il n'y avait aucune décoration. Tout reflétait l'idéal de simplicité prôné par Genkishi. Sarah releva la tête et remarqua que le professeur était présent dans la pièce, ce qui était inhabituel. Elle ne l'avait jamais vue manger, il ne touchait d'ailleurs pas à la nourriture en ce moment même, et elle avait toujours pensé que, de fait, il n'avait aucune raison de participer aux repas.

Emile : Ah oui, c'est vrai... Cela doit faire trois mois que vous êtes là, Harold et toi. Les trois premiers mois sont toujours les plus difficiles...

Le Roigada s'en alla après ces paroles mystérieuses, tandis que Sarah allait rejoindre son groupe d'amis habituels, qui semblaient plus proche de son âge que le Roigada qui avait presque dix ans de plus qu'elle. Elle se demandait tout de même ce que le Disciple avait voulu dire par là. Jusqu'ici, elle n'avait rien fait d'autre que des combats d'épées contre Harold ou contre William et suivre des cours de philosophie et de stratégie. Rien de bien passionnant, elle commençait même à en être lassée.A la fin du repas, Genkishi se leva et tout le monde s'empressa de se lever en même temps.

-Harold, Sarah. Cela fait trois mois que vous êtes ici maintenant.

Les deux adolescents se lancèrent un regard interloqué, tandis que les autres élèves sortaient peu à peu du réfectoire. L'appréhension nouait le ventre de Sarah.

-Il est temps pour moi d'assister à vos progrès. Battez-moi.

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Avant même que les deux élèves ne puissent comprendre ce qui se passait, l'homme-Munja apparut face à eux et les frappa de plein de fouet, le corps de Sarah se projetant sur une des tables qui se brisa sous le choc de l'attaque. L'un d'eux sortit alors son arme pour attaquer mais Genkishi attrapa la lame à main nue et la brisa d'un coup. Sarah tenta de sortir son épée aussi mais le Munja frappa dans le vide et la lame se réduisit en miettes. Celui-ci prit alors une pose victorieuse et s'arrêta de bouger, ne semblant pas ressentir quoi que ce soit face aux tentatives désespérés des deux adolescents.

-Vous vous êtes perfectionnés pendant tout ce temps au maniement d'armes et vos talents de bretteurs ne sont plus à revoir, il est vrai ! Je connais bien vos deux familles et je sais qu'avant de venir ici vous aviez déjà des cours d'escrimes par exemple. Cependant... Qu'en est-il de votre corps ? Qu'en est-il de votre force physique ? Si votre adversaire vous désarme, vous n'êtes plus rien !

Sarah s'entoura de flammes et fît apparaître des Caninos de feu qui bondirent vers l'homme-Munja qui ricana en voyant cela.

-Voilà qui est mieux ! Cependant...

Il donna un puissant coup dans le vide et les flammes ainsi que les Caninos disparurent. Cependant, les deux adolescents purent remarquer un autre changement bien plus radical : leur aura semblait avoir chuté de façon prodigieuse, à tel point qu'ils ne pouvaient plus combattre en utilisant leurs pouvoirs.

-Est-ce que vous pouvez faire mieux ? Est-ce que vous pouvez vous battre en ne comptant plus que sur votre corps et sur la force qui en émane ? Est-ce que vous pouvez ne faire qu'un avec votre corps au point de ne plus distinguer ce qui est esprit et ce qui est matière, ce qui est psychique et ce qui est physique ? Est-ce que vous pouvez trouver ce point d'Equilibre si subtil et délicat que nous avons en chacun de nous ?

Il donna un puissant coup de genou dans le ventre d'Harold tandis qu'il projetait Sarah en arrière avec un uppercut et s'avança vers eux, l'air impitoyable.

-Non, bien sûr que non ! Et c'est tant mieux.

En un instant, il apparut, accroupi, vers ses deux élèves à qui il tendit la main, son masque s'étant changé en un visage souriant :

-Car sinon, je n'aurais plus rien à vous apprendre. Vous avez réussis vos trois premiers mois avec succès.

Il aida les deux adolescents à se lever et déclara, hochant la tête de temps en temps comme pour approuver ses propres remarques :

-En effet, il était nécessaire que vous sachiez utiliser une arme "au cas où". De même, en utilisant une arme on apprends à se servir de son corps pour blesser à son tour. L'épée, manié par un véritable bretteur, devient une partie même de son corps. Ne pourrait-on pas dire de même que le corps devient une partie de l'arme... ? Je voudrais que vous reproduisiez cette sensation mais sans aucune arme. Juste votre corps, et vous. Voilà tout l'art des Rensha. Vous êtes à présent de véritable Disciples.

Sarah ne comprenait plus rien à ce qui se passait. Elle ne s'était jamais sentie aussi faible. Le Munja claqua des doigts et elle sentit son pouvoir et sa force revenir. Il devait en être de même pour Harold.

-C'est au fin fond de notre faiblesse qu'on peut trouver la véritable force. C'est dans le gouffre du désespoir qu'on trouve la plus belle lumière. Suivez-moi et je vous donnerai les moyens de vaincre vos peurs. Suivez-moi et vous saurez ce que cela implique véritablement de vivre en tant que Rensha. Vous avez été envoyé ici par vos familles. Vous avez été des élèves. Je vais vous poser une question à laquelle vous êtes libre de répondre. Est-ce que vous souhaitez devenir mes Disciples et suivre la voie de Rensha ?

Sarah ne répondit jamais aussi vite de toute sa vie. Pour la première fois de sa vie, elle sentit qu'elle avait les idées claires. Elle savait qui elle voulait devenir.

C'était le début de sa transformation.

Le lendemain, elle fût la première se lever pour aller à l'entraînement. La douleur de faire tous ces exercices le ventre vide la tiraillait d'abord. Elle remarquait qu'Harold, qui avait suivi le programme de Genkishi depuis le début, n'avait déjà plus de difficulté durant les exercices matinaux. Il était en avance sur elle. L'amour propre de la jeune fille en prit un coup mais elle pensa que ça ne pouvait jamais être pire que ce qu'elle avait ressenti hier, quand le Munja les avait terrassé. Elle allait ratrapper Harold. Peut-être qu'elle ratrapperait même les plus âgés comme Émile.
Elle en avait reparlé avec Harold mais aussi avec d'autres Disciples. La défaite avait été totale pour chacun d'eux. A les écouter, l'homme-Munja était simplement invincible. Son admiration ne faisait que croître sans cesse. Avec l'homme-Pifeuil, ils s'étaient mis d'accord pour devenir des Disciples exemplaire. Entre temps, trop focalisée sur ses études, elle oublia la porte que William avait emprunté.
Genkishi continuait à la faire s'entraîner principalement avec Harold. Si au début l'adolescent avait le dessus, ils finirent au bout de plusieurs mois par enchaîner les matchs nuls. L'homme-Munja nota qu'ils étaient tous deux complémentaires et qu'ils formaient un excellent duo. A côté des combats, ils commentaient chacun les techniques de l'autre. Ils étudiaient ensemble dans la grande bibliothèque de Genkishi. Il n'y avait bizarrement aucun livre sur Rensha lui-même, mais il y en avait beaucoup sur l'histoire de leur monde, sur la guerre des Kentucky et des Dacotas mais aussi sur les Légendaires. A force de passer autant de temps ensemble, ils se rapprochèrent, comme naturellement.

Un soir, en entrant dans la bibliothèque, Sarah aperçut Genkishi assis sur une chaise en bois, semblant méditer. Elle s'approcha doucement de l'armure dorée, songeant qu'elle n'avait jamais vue à quoi ressemblait son professeur sans cette tenue.

-Maître ? Je me demandais depuis longtemps mais, pourquoi est-ce qu'il n'y a rien sur Rensha dans cette bibliothèque ?

L'homme resta silencieux pendant un moment. Peut-être cherchait-il ses mots.

-Il y a eu une grande tentative d'effacer Rensha de notre histoire, Sarah. Je suis son dernier héritier et depuis des années j'éduque les jeunes esprits comme vous pour qu'il ne sombre pas dans l'oubli. On aurait perdu tous ses écrits mais j'ai la chance de les avoir lu. Les Ecritures sont gravées dans ma mémoire.

La jeune femme, devenue une Arcanin depuis peu, sembla gênée l'espace d'un instant. Elle demanda finalement, toujours hésitante :

-Est-ce que... Est-ce qu'il parle de moi dans ses Ecrits ?

Genkishi se leva en ayant un petit rire amusé et passa sa main dans les cheveux de la jeune femme, dans un geste paternel.

-Bien sûr. Rensha parle de tous ceux qui touchent de prêt ou de loin à équilibreur. Je me demande souvent si je choisis mes élèves parce qu'ils sont dans les Écrits où s'ils sont dans les Écrits parce que je les choisis... Tu veux savoir s'il parle d'Harold et toi ?

Sarah n'osa pas répondre. C'était une idée stupide qui lui était passé par la tête. Elle se rapprochait tellement d'Harold en ce moment...
Pour la première fois, Genkishi sembla hésitant. Il mit énormément de temps à répondre mais déclara finalement :

-Vous serez très heureux ensemble. Allez, va dormir maintenant, il se fait tard.

La jeune femme-Arcanin sembla encore plus gênée qu’auparavant. Elle s'inclina légèrement pour saluer son Précepteur avant de se réfugier dans sa chambre.

Genkishi ne lui avait pas menti. C'était certain.

Elle serait heureuse avec Harold. Il serait heureux avec elle.

Capitaine du Space Mountain Messages : 2092 Age : 29

Harold Metto s'entraînait inlassablement, avec une assiduité absolument parfaite. Pas un seul entraînement ne fut raté, pas un seul retard ne fut à noter, pas un seul écart aux ordres ne put exécuté. Originaire d'une famille soutenant et fournissant en hommes les Kentucky depuis des générations entières, la force et la discipline étaient des valeurs au cœur même de la vie quotidienne de l'homme Pifeuil. Il devait être au sommet. Se surpasser. Dévoiler tout son potentiel. Pour rendre fière sa famille. Pour rendre fier son maître, qu'il respectait tant.. Pour être à jamais à la hauteur de Sarah.

Les deux adolescents étaient arrivés en même temps, et avaient été amenés à s'entraîner presque constamment ensemble, du fait de leur extrême complémentarité en combat. Et c'était un choix très pertinent de la part de Genkishi. Effectivement, il était quasiment impossible pour l'un de vaincre l'autre au bout d'un certain cap, et il ne faisait que se tirer vers le haut à toujours essayer de surpasser l'autre malgré cela. A un certain stade, ils étaient même devenus les majors de leur promo, surpassant même Emile. Mais cela ne suffisait pas. Ils n'avaient toujours pas atteint le niveau de leur Maître. Ce dernier les encourageait, disait qu'ils étaient encore loin de leur vrai potentiel. Et Harold n'en doutait pas un instant.

Au bout d'un moment, cependant, une source de distraction commença à se créer. Lors de la vie quotidienne, l'Homme qui avait évolué en Tengalice se mît à développer des sentiments envers la femme Arcanin, et durant les entraînements, il devenait difficile de ne pas se laisser détourner l'attention par la poitrine de plus en plus généreuse et tentatrice de Sarah. Cela causa un léger ralentissement dans son entraînement, et Harold ne pouvait se le permettre. Dans sa famille, de nombreuses techniques de concentration existaient, en faisant des guerriers très rigoureux. L'une d'elles fut la solution à ses problèmes : Lorsque quelque chose te distrait de ton objectif, élimine-la ; si tu ne veux pas éliminer cette chose et que ton corps veut que tu considères ça comme un objectif, accepte cette distraction un bon coup, fais en partie intégrante de toi. Et quand elle était enfin tienne, tu pouvais l'expulser aux moments propices à cela, afin d'effacer toute trace de tentation et de distraction quand tu te recentrais sur ton véritable objectif.

Ce fut ce que Harold fit. Il vint voir Sarah dans son temps libre, lui déclara ses sentiments, découvrit qu'ils étaient réciproques, et les deux personnes purent exulter cette tentation, ces pulsions incontrôlables. Rapidement, ils rentrèrent cette exaltation à part entière dans leur entraînement. Ils avaient leurs horaires pour leur entraînement, et leurs horaires pour leurs sentiments. Et à la suite de cela, chacun devint encore plus efficace dans son apprentissage. Ils ne voulaient plus juste devenir les meilleurs. Ils voulaient montrer à l'autre le meilleur d'eux-même. Chaque combat était d'une intensité extrême, mêlant détermination et complicité.

... Puis vint le jour, à leurs vingt ans où Harold fut convoqué par sa famille pour une réunion importante.

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https://www.youtube.com/watch?v=JMRQTZBJL90

-Harold : ... Je vais arrêter ma formation ?

-Père : Oui. Dans un mois. J'ai eu les retours de ton école, qui m'informe de ton excellent potentiel. C'est une fierté de voir que notre dernier fils soit aussi puissant, cependant, nous estimons que tu as atteint un stade où seul le véritable combat, la guerre quotidienne, l'expérience du terrain te permettra vraiment de progresser.

-... Je vois. J'aurais apprécié pouvoir atteindre un stade où je serais capable de tenir le Maître en combat singulier, mais si cela est votre choix, Père...

Toute la famille Metto était réuni autour d'une table aux allures asiatiques, assis sur les genoux. Il y avait les trois frères aînés de Harold, sa petite sœur, ainsi que son père et sa mère. De toute évidence, il allait devoir abandonner sa détermination actuelle... Cependant, il restait pragmatique et se doutait que cela ne pouvait durer éternellement. Rien ne l'empêcherait de revenir voir le Maître de temps en temps pour le défier une fois l'expérience du vrai combat acquise. Et puis, rien ne l'empêchait de continuer à voir secrètement Sarah...

-Père : ... Autre chose. J'ai appris pour ta relation avec la fille des Enorenia.

Le jeune disciple se figea, n'osant plus bouger, et regarda douloureusement dans les yeux son père, qui le toisait empli de jugement.

-Harold : Père, je... Je suis vraiment désolé.

-Tes excuses m'importent peu. Mais ta sincérité et le fait que tu assumes tes actes, si. Je suis heureux de voir que tu es bien le fils que je connais, et non un oisif coueur de jupons prêt à mettre en péril l'honneur de notre famille... Même si j'aurais préféré l'entendre de ta bouche.

-...

-Je ne compte pas te punir pour ça, j'ai fait en certes de faire taire financièrement ceux au courant de cette bavure et qui me l'ont transmises, donc l'affaire est sauf, et de plus, tes résultats sont tout bonnement excellents, et ne semblent pas avoir souffert de cette relation, au contraire. Cependant, je veux que tu cesses toute relation, même amicale, avec elle.

-Harold : ... Mais, Père...

-Pourquoi contestes-tu encore, Harold ? Ne prend-tu pas conscience du fait que nous disons pas seulement pas pour notre famille, mais aussi pour toi ?

Harold écarquilla les yeux et baissa ce coup-ci son regard, comprenant où son père voulait en venir. Cependant, ce dernier prit quand même le temps d'expliciter sa pensée.

-Père : Tu vas rejoindre l'armée des Kentucky. De part sa famille, elle va rejoindre l'armée des Dacotas. Que feras-tu le jour où vous vous retrouverez face à face sur un champ de bataille ? Tu l'épargneras ? Quitte à mettre l'avis de tes camarades en péril ? Ton honneur ? Le nôtre ? Tout ce pourquoi tu t'es tant entraîné ? Ne regretteras-tu pas de ne pas m'avoir écouter, le jour où tu devras enfoncer ton arme dans le corps de celle que tu aimais ?

-...

-Quitte-la. Brisez tout lien. C'est la meilleure façon de rendre cette situation vivable le jour où elle arrivera. Pour toi. Pour notre famille.

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Harold avait fait venir Sarah dans leur coin habituel, où ils retrouvaient pour discuter en tout intimité, ou plus si tentation se ressentait. Cependant, le contexte était très différent aujourd'hui. L'homme Tengalice avait réfléchi aux paroles de son père, et il savait qu'il avait raison. Tout devait s'arrêter là. C'était pour le mieux. Mais il ne pouvait pas juste lui dire la vérité. Elle ne renoncerait pas à lui, et ils ressentiraient encore quelque chose l'un pour l'autre le jour où ils s'affronteraient. Du coup, il n'y avait qu'une solution pour rattraper son erreur. Une seule solution pour qu'ils puissent s'affronter en tant qu'ennemi : Il devait faire en sorte qu'elle le déteste.

-Sarah, j'ai à te parler de quelque chose d'important. J'ai rencontré une autre fille, d'une famille très proche de la mienne. Sans même parler de l'intérêt diplomatique, je suis tombé amoureux d'elle le jour même que je l'ai rencontré, et je vais me marier avec elle son peu.

D'extérieur, il était froid et sec, mais de l'intérieur, quelque chose se brisait en Harold.

-Nos petites escapades sexuelle étaient amusantes, mais je ne suis sorti avec toi que pour ne plus être distrait pendant l'entraînement. Je suis désolé, mais je ne peux plus te mentir, Sarah. Je te quitte.

Sarah resta interdite pendant un moment.

Ce n'était pas le Harold qu'elle connaissait.

Ce n'était pas le Harold qu'elle aimait.

Ca ne pouvait qu'être un mensonge. Alors, pourquoi ? Pourquoi est-ce qu'Harold avait l'air aussi sérieux ? Pourquoi est-ce qu'il n'y avait aucune émotion dans ses paroles et dans ses regards ? Il était en train de lui dire qu'il l'avait simplement désiré. Qu'il avait été trop attiré par son corps pour se soucier d'autre chose. Il l'aurait aimé par pulsion. Par nécessité, presque, pour ne plus être tourmenté par sa beauté. Pour la première fois depuis qu'elle était devenue une élève de Genkishi, elle détesta son corps au plus haut point, qui la dégoûtait. Pourquoi est-ce qu'il avait été si doux et si drôle avec elle pendant tout ce temps ? Et ces heures de discussions, de confessions, ce n'était aussi que pour son corps ? Et Genkishi, pourquoi lui avait-elle mentit, lui, ce professeur qu'elle admirait tant, à qui elle voulait tant ressembler ?
Elle sentait qu'elle tremblait. Elle avait envie de crier, de lui demander pourquoi mais elle n'y arrivait pas. Peut-être était-elle trop fière. Ou plutôt, peut-être que sa douleur était trop forte pour être exprimé par le moindre sentiment. Lentement, elle releva la tête et déclara d'une voix froide et distante :

-Tu me dégoûte, Harold Metto.

Elle s'en alla sans lui jeter un second regard. Elle n'avait plus rien à lui dire et lui non plus. Elle était d'abord retournée dans sa chambre où elle s'effondra. Tout la ramenait à lui. Ils avaient passé trop d'années dans le même lieu pour que son souvenir ne soit pas gravé dans chaque chose. Lorsqu'elle n'eut plus de larmes à verser, il ne lui resta plus qu'une haine profonde. Il ne l'avait aimé que pour son corps. Il s'était joué d'elle. Il venait de gâcher les plus belles années de sa vie. Elle allait gâcher son avenir.

Elle retourna vers la chambre de l'homme-Tengalice et poussa la porte. Elle s'attendait à le voir et voulait le détruire. Cette fois-ci, avec toute la colère qu'elle portait dans son cœur, elle le terrasserait. Mais il n'était pas là. Il n'y avait que sa chambre, vide. Un sinistre rictus illumina alors le visage de la femme-Arcanin. Elle allait trouver un moyen bien plus douloureux pour faire souffrir Harold.

Les dernières semaines avec Harold comme camarade de classe auraient dû être une pure souffrance mais après ce qu'elle avait fait, la jeune femme se sentait si soulagée qu'elle ne pouvait que se réjouir en voyant l'air impassible du Tengalice. Il ne pouvait pas se douter de ce qui allait lui arriver, lui. Elle se demanda si Genkishi était au courant de leur séparation lorsqu'elle remarqua qu'il la faisait plutôt combattre face à Emile. Lui aussi allait bientôt partir. Il devait épouser une femme-Crustabri et devenir le prochain Basile de l'Archipel Aquatique. La jeune Caninos se disait que ça allait devenir bizarre sans lui. Il fallait qu'elle songe aussi à partir de cette école. Tout lui rappelait Harold et, malgré sa vengeance, elle sentait bien qu'elle ne se battait plus comme avant. Elle avait entendu Genkishi réprimander Harold en lui disant qu'il ne faisait plus preuve de la même persévérance. Un jour, après l'entraînement, il regarda tour à tour Sarah et Harold et soupira, l'air dépité :

-Vous pourriez devenir tellement plus...

Ce soir là, il secoua la tête et s'en alla sans qu'on ne l'aperçoive jusqu'au lendemain où, au petit-déjeuner, il annonça que c'était le dernier jour d'Harold.

-Même s'il n'est plus un élève de cette école, il sera toute sa vie un Disciple de Rensha. J'espère que ta vie, et ce quels que soient tes choix, sera toujours rythmée par une soif de Justice, un désir ardent de protéger l’Équilibre et par un respect inébranlable envers ton corps. N'oubliez pas d'où vous venez pour toujours savoir où vous irez. Chaque élève ici se souviendra de toi, Harold Metto, comme d'un exemple à suivre pour devenir un Disciple honorable.

A la fin du déjeuner, Harold s'en alla. Les deux ex-amants ne s'adressèrent pas un mot. Plus tard dans l'après-midi, William vint apporter à Sarah une lettre que ses parents lui adressaient. Elle l'ouvrit et la lu avec attention avant de s'effondrer sur son lit, un sourire apaisé au visage. Tout se passait comme prévu. Harold n'était plus son amant, ni son ami, ni son camarade. Ce n'était plus qu'un salaud qui l'avait fait souffrir. Alors elle n'avait aucun remord à avoir.

Plus tard, alors qu'elle s'apprêtait à aller dans la bibliothèque, elle passa devant une porte légèrement entre-ouverte. C'était une porte en chêne massif avec le nom "GENKISHI SHIBUSEN" écrit dessus. Le bureau du Précepteur. Elle poussa légèrement la porte, animée par la curiosité et eut un mouvement de surprise lorsqu'elle entendu son professeur déclarer :

-Sarah Enorenia ? Rentre donc. Je savais que tu viendrais me voir.

Elle poussa un peu plus la porte et entra dans une petite pièce. Genkishi était à son bureau, mais il ne s'agissait pas d'un bureau pour recevoir et parler avec des personnes. Le meuble était plaqué contre le mur et Genkishi faisait dos à la jeune femme. Toujours en armure, il écrivait à la plume et à la lumière d'une bougie dans un épais manuscrit. Sarah était trop éloignée et il faisait trop sombre pour qu'elle puisse déchiffrer les lettres mais elle remarqua que tous les murs du bureau étaient couverts d'étagères qui craquaient sous les poids de manuscrits du même type que celui où Genkishi écrivait. La jeune Arcanin resta silencieuse, comme émerveillée par cette facette de son professeur qu'elle n'avait jamais vue auparavant.

-Tu viens me voir car tu es tourmentée à cause du départ de Metto Harold, n'est-ce pas ?

Elle n'osa pas répondre. Genkishi ne semblait pas attendre de confirmation de sa part de toute façon.

-Hélas, malgré mes efforts, je ne peux vous éloigner de la guerre. Les Kentuckys et les Dacotas détruisent tout sur leur passage, même les amours de jeunesse.

La jeune femme prit un air interloqué. Visiblement, Genkishi n'était pas au courant de la raison pour laquelle Harold l'avait quitté...

-Je n'avais pas le coeur de vous séparer. Je voulais que le Schème de l'Univers suive son cours... Que vous choisissiez votre propre bonheur. Hélas, la vie est toujours plus cruelle. Je savais au fond de moi que les parents de Harold allaient le forcer à se séparer de toi. J'imagine que tes parents auraient fait de même s'ils avaient été au courant de votre relation. Tu es une Dacota et il est un Kentucky. Dans vos familles, vos camps sont décidés dès la naissance... Et la guerre importe plus que l'amour, j'en ai bien peur.

Sarah écarquilla les yeux. Qu'est-ce qu'il racontait ? Genkishi n'était pas le genre de personne à inventer des histoires ou à mentir. Il était bien trop bienveillant pour cela, surtout avec ses élèves qu'il considérait presque comme ses enfants. Alors ça voulait dire... Il n'y avait qu'une seule possibilité... C'était Harold qui lui avait menti.

Quelle erreur avait-elle commise ?

https://youtu.be/q43wzP6A1CM

Quelle horreur avait-elle commise ?

C'était la seule chose qu'elle pouvait penser maintenant. Sarah avait fuit l'école de Genkishi le plus vite possible. Elle était partie et avait profité de l'aide d'Emile pour arriver le plus vite possible. Le plus vite possible... Mais ce n'était pas suffisant.

Elle avait prévenue ses parents depuis longtemps. C'était elle qui leur avait envoyé des informations, trouvées dans la chambre d'Harold, qui permettrait, selon ses dires, de "détruire une des familles les plus influentes des Kentucky". Dans leur réponse, sa famille l'avait félicité. Ils étaient fiers de voir que leur fille n'oubliait pas son devoir avant tout. Ils lui affirmaient qu'ils allaient en profiter pour attaquer dès que possible, au moment le plus propice.

Ils avaient tenu parole.

Face à elle, tout l'archipel était à feu et à sang. Littéralement. La magnifique forêt où s'était installée la famille Metto depuis des générations étaient en feu. N'écoutant plus que son coeur, la jeune femme se mit à courir dans la forêt enflammée, ne craignant de toute façon pas les flammes. Elle ne vit qu'un tas de corps méconnaissables et des ruines de bâtiments de toute part. Elle arriva enfin devant la demeure des Metto qui était en feu elle aussi. La famille Metto était exterminée. Les soldats de la famille Enorenia aussi. La haine des deux camps, cette haine inconditionnelle et sans fin que seule la guerre semble faire germer dans le coeur des hommes, s'était déchaîné sur cet archipel. Il n'y avait plus de clan Dacota ou de clan Kentucky. Il n'y avait plus de famille Metto.
Il n'y avait plus que des morts.
Et au milieu de tout ça, il n'y avait plus que Sarah et Harold, tout deux face à ce massacre.

Capitaine du Space Mountain Messages : 2092 Age : 29

Harold était dos à Sarah, debout face au massacre et à l'incendie. L'homme-Tengalice se tourna lentement vers Sarah. Il avait le corps de sa petite sœur de six ans dans ses bras. Celle-ci, même si elle n'avait pas été attaquée directement, avait succombé aux brûlures de l'incendie. Les larmes de Harold avaient coulé sur le corps de celle-ci, et désormais, son visage était vide de tout sentiment. C'était un visage brisé, qui ne put que poser lentement le corps de sa sœur sur le côté en lui fermant les yeux, avant de se tourner vers Sarah.

-Harold : ... Sarah... Je t'aimais... Et même si j'ai du te mentir, je l'ai fait pour te protéger... Et pourtant, tu... tu...

L'homme Tengalice ne put rien dire de plus. Aucun mot ne lui venait. Il savait pertinemment comment tout ceci était arrivé, et par la faute de qui. Il détestait en cet instant la femme Arcanin pour ce qu'elle avait fait... Mais plus que tout, il se détestait lui-même pour être le véritable responsable de tout ça. Harold serra les poings fortement, et finalement, après un long silence, trouva les mots qu'il lui fallait en cet instant. Des mots pleins de haine et de désespoir.

-Je vais te tuer, Sarah. Je vais te tuer. Je vais te tuer. Je vais te tuer. Je vais te tuer !

Une immense bourrasque de vent se souleva autour de Harold alors qu'il brûlait de rage, relâchant toute sa colère d'un coup en s'élançant vers la femme Arcanin.

-Rend moi ma famille ! REND LA MOI !

Sarah restait immobile en voyant Harold courir vers elle. Elle ne pouvait pas détourner son regard du corps de la petite Grainipiot. Elle ne pouvait pas détourner son regard de cette famille, de ce manoir, de cette forêt qu'elle avait détruite.

Elle haïssait Harold pour ce qu'il avait fait. Il avait été stupide. Il aurait dû lui dire la vérité. Elle aurait souffert mais elle aurait pu l'accepter.
Mais face à ce spectacle tragique, face aux conséquences de ses actions, c'était elle qu'elle haïssait avec le plus de force. Elle se dégoutait. C'était une facette de la philosophie des Rensha. Lorsqu'on a un véritable contrôle sur soi, lorsqu'on est un véritable guerrier aguéri, on ne peut plus blâmer le monde et les autres comme responsables de nos malheurs. On sait ce qui dépend de soi. Là, c'était comme si elle avait tuée elle-même toute la famille d'Harold. Elle en était pleinement responsable. Elle méritait d'être punie.

Oui, c'était très bien comme ça.

Harold allait la tuer. Il se sentirait sans doute mieux après. Elle se sentirait mieux, elle aussi. Elle aura expiée ses fautes.

??? : Je ne peux pas te le permettre, Metto Harold.

Sarah avait fermé à moitié ses yeux, aveuglé par une puissante lumière, tandis qu'une épaisse bourrasque fît s'éteindre toutes les flammes présente sur l'archipel et que la pluie commençait à tomber. Elle rouvrit les yeux lorsque la lumière s'affaiblit et put voir le dos d'une armure en or. Genkishi était là, entre les deux Disciples, tenant Harold par le poignet et lui faisant visiblement une clé de bras assez forte pour immobiliser l'homme-Tengalice. Le Précepteur avait parlé d'une voix douce mais ferme à la fois, dénuée de colère mais qui avait tout d'un ordre à suivre.

-Que vous gâchiez votre potentiel en sombrant dans la haine ne tiens qu'à vous, mais je ne peux vous laisser gâcher vos vies.

Tout en tenant encore le poignet de son Disciple, l'homme-Munja asséna un coup sur le crâne d'Harold, l’assommant complétement. Il balaya les alentours du regard, l'air songeur. Harold n'était plus un Disciple et ne voudrait sûrement plus en entendre parler. Il n'y avait plus aucun danger ici maintenant qu'il avait mis fin à l'incendie. Il resta comme ça un instant, regardant le corps de son élève, puis lâcha mélancoliquement :

-Le reste n'appartient qu'à toi, Harold. Rends ta vie mémorable.

En un instant, il fît volte-face et se retrouva face à la femme-Arcanin, qui semblait elle aussi assommée, mais mentalement.

-Maintenant, Enorenia Sarah... Suis-moi. Vous vivrez tous les deux. Tu as encore de grandes choses à accomplir.

Il prit la jeune femme et la souleva pour la porter sur son dos. Celle-ci resta muette, les yeux rivés sur le corps d'Harold qui semblait rétrécir petit à petit à mesure que Genkishi s'éloignait avec elle. D'un coup, toute la douleur qu'elle avait emmagasinée jusque là et elle éclata en de bruyants sanglots, se mettant à donner de faibles coups de poing sur le dos de son Précepteur en lui demandant de la reposer, de la laisser avec Harold, de les tuer tous les deux s'il le fallait et tout un tas d'autres requêtes insensées. Ils arrivèrent au bord de l'île, le regard de Genkishi sondant longtemps l'abîme infini sous leurs pieds.

-Je sais à quel point tu souffres, Sarah. Je suis passé par là, moi aussi. Pourtant, tu as encore tant de choses à faire. Je le sais. Tu seras une femme formidable.

-Je ne peux même pas vous faire confiance... Pourquoi... Pourquoi est-ce que vous m'avez menti sur notre avenir ? Pourquoi est-ce que vous ne m'avez pas dit que j'allais devenir un monstre ? Je ne mérite ni de vivre ni de connaître le bonheur après ce que j'ai fais !

-Ecoute moi bien, jeune fille et grave ces paroles dans ton esprit. Il n'y a aucun mensonge dans les Ecritures. Il n'y a que des erreurs d'interprétation qu'on ne peut qu'attribuer à notre mauvaise compréhension des paroles de Rensha. Tu es au fin fond du désespoir et tu crois qu'il n'y a plus aucune lumière qui puisse te secourir. Cependant, lorsqu'on se trouve au fond du gouffre... Il ne nous reste plus qu'une option. Rebondir.

À ces mots, l'homme Munja bougea le corps de Sarah pour le prendre dans ses deux bras et le caler contre sorte, puis il bondit vers le vide, se laissant tomber pendant quelques secondes qui terrifièrent la femme-Arcanin, jusqu'à ce que deux magnifiques ailes qui semblaient être en or pures se déployèrent du dos de l'armure, ceux-ci s'envolant à toute vitesse. La jeune femme continua à sangloter et à se maudire, elle et le destin. Genkishi, lui, ne faisait plus qu'écouter. Grâce à la vitesse prodigieuse du Munja, ils arrivèrent en moins d'une heure devant le bâtiment de l'école. William les attendait devant ce bâtiment, avec un jeune adolescent Absol d'une quinzaine d'année, environ seize ans. Genkishi reposa Sarah à terre et la poussa légèrement en avant, comme pour lui faire signe de s'avancer vers le jeune homme. Il lui murmura à l'oreille :

-Comme tu le sais, les Eneronia et les Koléana sont des alliés de longue date. C'est pourquoi William a tenu à ce que tu rencontres son petit-fils, Nyx Koléana. Je te prévois un grand avenir aux côtés de ce jeune homme.

Sarah s'avança timidement vers l'adolescent, ses yeux encore gonflés de larmes et son coeur emplit de regret. Elle avait détruit la vie d'Harold et par là-même elle avait détruit tout son monde avec. Elle se détestait. Elle voulait mourir. Mais son Maître le lui avait interdit. Elle regarda tour à tour l'homme-Munja puis William, ne voyant qu'une profonde bienveillance dans leurs regards. Une bienveillance qu'elle ne méritait pas. Son regard se concentra à nouveau sur Nyx.

Elle prit une profonde inspiration.
Malgré la douleur, malgré les larmes, malgré les regrets, malgré sa haine envers elle-même qui la brûlait de l'intérieur...

Il était temps de rebondir et de reconstruire sa vie.

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https://www.youtube.com/watch?v=8hFb10p7uWg

Harold était seul, au sol, inconscient. Il n'y avait plus aucune de trace de vie, si ce n'est le bas battement de cœur de ce Disciple meurtri, jusqu'à ce que finalement, des silhouettes apparaissent de nul part sur l'île. Quatre au total. L'une d'elles regarda les environs l'air perplexe.

-??? : C'est un vrai massacre... Nous arrivons trop tard...

-Tss, quel ennui...

-??? :Bon sang... Bon sang... Ces Dacotas... Ils vont me le payer, je te le jure. Ils vont découvrir qu'une Kentucky n'oublie jamais, surtout pas les affronts.

-??? : ... Hey ! Il y a un survivant ! Ici !

Les quatre silhouettes s'approchèrent alors du corps assommé de Harold, celui ayant dit cela et le plus massif des quatre étant penché en train de prendre son pouls.

-??? : Ne t'inquiète pas, mon gars... On te laissera pas crever ici... Je te le promets.

Suite à ce tragique événement, Harold se réveilla chez les Kentucky, sauvé par ces derniers. Là où revenait sa place. A partir de là, l'homme Tengalice suivit les conseils de son ancien Maître à sa façon. Il allait se façonner une vie mémorable, oui. Il allait s'entraîner des années durant, avec encore plus de détermination qu'auparavant. Il deviendrait l'un des plus jeunes Kentucky à rejoindre le rang de membre d'élite, aux côtés de ces quatre hommes qui l'avaient autrefois sauvés. Il devint célèbre parmi ses troupes, et son potentiel ne cessait de croître. Et tout cela, avec un objectif en tête.

Il allait tuer tous les Dacotas, jusqu’au dernier. Et ceci, quoiqu'il lui en coûte.

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-Harold : ... L'Âme Ultime... ?

-Eins : C'est bien ça. Je ne pensais pas voir un tel Art Interdit un jour.

-Et cela signifie quoi au juste ?

Harold se trouvait dans une salle de réunion du QG des Stalkers, avec Eins, leur tout récent chef, ainsi que les Stalkers Zwei, Funf, et Midales. Eins prit une pose songeuse, réfléchissant à la question, prenant son temps pour répondre.

-Ton pouvoir simule tout simplement l'état d'Ame Ultime, un type d'âme extrêmement rare en ce monde. Pour te donner une idée, dans le monde entier et depuis des siècles, je crois bien qu'il n'y a que trois personnes qui se sont révélées posséder cet âme naturellement. Une Âme Ultime est une âme éternelle, qui lorsque son corps meurt, reste présente malgré tout et peut continuer à exister via un autre réceptacle. Le problème étant que l'âme perd tout souvenir présent dans son ancien corps, bien qu'elle garde son identité propre.

-Donc... Je suis immortel ?

-C'est un peu ça. Et de ce que je vois, tu peux, contrairement à une Âme Ultime classique, te déplacer volontairement d'un corps à un autre. Tu devrais même pouvoir posséder des objets. Le risque étant cependant que l'objet soit détruit quand tu es dedans, et que tu perdes ta mémoire... En étant un objet, ça reviendrait à perdre ta conscience et donc laisser une âme vide errer pour l'éternité.

-Harold : Je vois... Intéressant... Cela devrait se révéler très efficace contre ces rebelles.

-Funf : Harold, non.

L'homme-Tengalice prit un air étonné et se tourna vers Funf, qui le fixait d'un air inquiet.

-Harold : Martin... J'ai déjà fait mon choix. Nous avons besoin de cette puissance pour faire payer aux Dacotas. Ils ont fui pendant qu'on se ferait massacrer par les Légendaires, tu te souviens ? Et ils ont fait je-ne-sais-quoi d'Heisenberg... Ils l'ont sûrement éliminé.

-Funf : Harold doit pas. Harold aimer son corps. Harold renier lui pour vengeance.

-Zwei : Martin... Y a-t-il un seul de nous quatre qui n'a pas sacrifié une part de lui-même pour devenir ce qu'il est aujourd'hui ?

Funf fronça les sourcils et serra les poings, baissant le regard alors que l'homme Libegon tendait son poing en avant.

-Harold a raison. Les Dacotes nous ont trahis et fait souffrir. Ils se sont comportés comme des lâches. Encore. Cette fois était celle de trop... Car un Kentucky n'oublie jamais.

L'homme-Tengalice acquiesça de la tête et tendit son poing à son tour, touchant celui de Zwei.

-Harold : Un Kentucky n'oublie jamais.

Midales, qui était resté calme et silencieux, les bras croisés, soupira et tendit sa main gantée d'une armure, plaquant son poing contre ceux des deux voisins à son tour.

-Midales : Un Kentucky n'oublie jamais.

Funf sembla hésiter un petit moment, puis finalement, releva un regard attristé vers ses camarades, plaquant son poing à son tour, les quatre hommes formant une croix avec leur bras. Mais il y manquait malheureusement une branche, désormais. L'homme Torterra prononça alors les mots avec une facilité déconcertante malgré ses problèmes pour dialoguer, ses mots sortant aussi facilement qu'un bonjour ou un merci.

-Funf : ... Un Kentucky n'oublie jamais.

Eins regardait les quatre survivants sans bouger. Même s'il n'affichait aucun expression, au fond de lui, c'était un véritable sourire diabolique qui s'affichait.

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Harold Metto avait déjà quitté son corps de lave, s'étant désormais transformé en une bourrasque de vent, qui prit une forme de silhouette humaine aux yeux brillants, exactement comme avec la lave plus tôt. Il s'était entraîné des heures durant pour maîtriser ce pouvoir si dangereux. Il avait dépassé les limites du corps humain. Il n'appréciait pas cela. Il se détestait pour cela. Mais il en avait besoin. Il en avait besoin pour mettre fin à la vie de toutes ces personnes qui ne cessaient de faire souffrir son entourage. La bourrasque de vent grandissait de plus en plus, devant très grande par rapport à Heatran et Sarah.

-Comment on en est arrivés là ? Nous avons tout raté, Sarah, et tu le sais très bien. Comment peux-tu me juger pour ce que j'ai fait ? Après ce que toi tu as fait par haine ?

Un vent redoutable s'abattit en direction de Sarah.

-Je vais t'éliminer. Puis j'éliminerais les Dacotas et les Déchus. Et je mourrais sûrement dans le processus. Mais peu m'importe. Ma vie a été gâchée le jour où ma famille est morte. Elle s'est arrêtée il y a longtemps. Je ne suis plus qu'un réceptacle dédié à la vengeance et à la haine... L'expression totale de ce que tu étais à l'époque, n'est-ce pas... Sarah... ?

Sarah regardait tristement la silhouette venteuse qui était maintenant le "corps" d'Harold. Il avait tout abandonné à cause d'elle, même les enseignements de Genkishi. Elle savait à quelle point il admirait son professeur. Il l'aimait au moins autant qu'elle. Pourtant, il avait renié ces enseignements, renié son corps. Tout cela à cause d'elle.
En ce moment, elle ne détestait plus Harold. Mais elle se détestait toujours autant qu'au premier jour, toujours autant que la fois où son regard ne pouvait plus quitter le manoir Matto, réduit en cendres par sa faute. Oui. C'était sa faute depuis le début.

Elle soupira, croisant ses bras lorsque la bourrasque fonça vers elle. La chaleur qui émanait d'elle était telle qu'elle bloquait de suite la tempête qui changea de direction. Elle lança un regard entendu vers Heatran, qui acquiesça. Il semblait comprendre qu'il ne s'agissait plus d'un combat entre Stalker et Rebelle mais bien d'un combat entre deux êtres dont l'existence était entremêlé de façon fatidique.

*Sarah, Harold... Votre haine n'est plus de mon ressort. Les seules personnes que vous haïssez vraiment ici, c'est vous même. Je peux retirer ou infliger de terribles brûlures mais je ne peux rien faire pour la haine qui consume vos cœurs.*

La femme-Arcanin prit une profonde inspiration.

Elle resterait fidèle aux enseignements de Genkishi jusqu'au bout. Elle lui était trop redevable. Elle ne pouvait pas en vouloir à Harold ceci dit. Il avait raison, c'était elle qui l'avait tuée et qui avait façonnée son terrible destin. Elle soupira profondément, relâchant tout l'air qu'elle avait inspiré, mais ce n'était plus de l'air qui sortait de son corps, c'était une véritable tempête de flammes qui tourbillonnèrent autour d'elles avant de se greffer à même sa peau, formant une armure qui semblait faire partie intégrante de son corps. Les cieux se couvraient d'épais nuages noirs alors que le visage de la jeune femme devenait de plus en plus grave.

-Comme tu peux le voir, Harold, je n'ai jamais cessé de pratiquer l'art des Rensha. Je ne me suis très peu battu contre ces Légendaires, car nous savons tous les deux qu'ils ne sont pas la cible des Disciples. Je n'ai jamais voulu faire faux bond à Genkishi. Tu aurais été pareil si je ne t'avais pas fait ça. Tu aurais été un puissant guerrier qui n'aurait jamais été corrompu par la haine. C'est vrai. Tu es semblable à cette jeune peste que j'ai étais à l'époque, à cette gamine stupide qui a détruis ta vie sous le coup de la colère.

Elle s'avança petit à petit vers la silhouette immatérielle, l'air se brouillant autour d'elle tant la chaleur qui émanait de son corps était importante, le sol fondant même sous ses pas, la terre prenant feu sur son passage. Elle s'arrêta à quelques centimètres de son ancien amant, les yeux embués par des larmes qui semblaient s'évaporer avant même de toucher le sol.

-Toute cette haine que j'avais envers toi c'est retourné contre moi le jour où j'ai détruis ta vie. Je voulais simplement mourir pour ne plus être torturé par cette douleur que je nous ai infligé à tous les deux. Mais Genkishi m'a poussé à vivre. J'ai alors compris le véritable sens de ses paroles, toutes les fois où il nous a dit que nous serions toujours responsable de nos actions et qu'il n'y avait pas de plus grands fardeaux. Toute ma vie, j'ai été consumé par la haine et par le dégoût que me provoquait ma propre existence. Toute ma vie, j'ai continué à porter le poids de cette haine... Et je me rends compte maintenant que toi aussi.

Elle donna un simple coup de pied sur le sol de l'île et celle-ci se mît à trembler comme si un véritable séisme avait lieu, des crevasses s'ouvrant de part en part sur celle-ci d'où s'échappaient de puissantes flammes qui montaient jusqu'aux cieux.

-Je pourrais détruire cette île en un instant avec la force que j'ai maintenant. Je pourrais tout exterminer pour que tu n'ai plus rien à posséder. Je pourrais tenter, vainement peut-être de te détruire. Mais je veux agir en Disciple jusqu'à ma fin. Non, plus important encore, je veux agir comme quelqu'un qui t'aime vraiment, Harold Metto.

La jeune femme ouvrit ses bras et son armure disparut instantanément, réduite en fumée, son corps semblant complétement vulnérable maintenant.

-J'ai toujours su que ça devait se finir comme ça. Notre Maître m'a dit un jour que nous finirons par être heureux ensemble. Les Ecrits de Rensha sont obscurs et parfois même incompréhensible... Peut-être que c'est ce qui devait se passer. Tu seras heureux de me tuer et je serais heureuse de mourir sous tes coups. Vas-y. Ne te prive plus. Tu en as rêvé depuis si longtemps... Et moi aussi.

Capitaine du Space Mountain Messages : 2092 Age : 29

Il y eut un grand silence autour de Sarah. Plus rien ne bougea d'un seul coup lorsque Sarah se mît à découvert, alors que jusqu'alors, les assauts de l'ancien Homme Tengalice n'avaient jamais cessé. Pendant de longues secondes, qui semblèrent une éternité, rien ne se passa, dans une tension intense. Puis soudain, la voix de Harold émana du vent.

-Tu... Tu crois quoi... ? Régler les choses ainsi ? En offrant aucune résistance ? En disant que tu m'aimes... ? Tu penses tout régler ainsi... ? C'est n'importe quoi !

https://www.youtube.com/watch?v=4Zr__aDoLoc

Une bourrasque de vent, sous la forme d'une lame tranchante, s'abattit sur la position de Sarah, soulevant une grand surface de terre et de poussière sous la violence du coup, alors la silhouette de vent de Harold reprenait forme et commençait à frapper avec violence là où se trouvait la femme Arcanin, chaque coup étant puissant et redoutable.

-Je vais te tuer, oui ! Mais ne crois pas que je vais en tirer quelconque bonheur ! Je vais en souffrir ! Et ne jamais être rassasié ! C'est le concept de la revanche ! C'est le concept de la haine ! C'est le concept de la guerre ! Un cercle vicieux et infernal !

Le Lieutenant Stalker ne semblait plus s'arrêter, déchaînant toute la haine qu'il avait accumulé dans ses attaques. Avoir une forme de vie aussi complexe que celle du vent lui coûtait de l'énergie, beaucoup d'énergie, et la dépenser ainsi lui faisait prendre le risque de mourir après coup en perdant le contrôle de son pouvoir, et en disparaissant dans l'oubli. Mais peu lui importait. Sa colère était trop grande. Il l'avait gardé en lui trop longtemps. Ça devait... sortir...

J'ai détruit notre relation ! Tu as détruit ma famille ! J'ai trahi Genkishi ! Nos morts ne sont que la fin amplement méritée pour ces crimes ! Toi consommée par la culpabilité, et moi par la haine ! Tu as tué mon père ! Tu as tué ma mère ! Tu as tué mes frères ! Tu as même tué ma sœur ! Alors, pourquoi... Pourquoi... ?

L'ancien Kentucky se posa sous sa forme étrange sur le sol, à quelques mètres de la position de Sarah, alors que la fumée se dissipait sur celle-ci.

-Harold : Pourquoi... Je t'aime toujours au fond de moi... ? Pourquoi... Suis-je incapable de te tuer... ?

https://www.youtube.com/watch?v=wHr5O5QLTVc

La fumée termina de se dissiper. Sarah était toujours là, debout, le sol autour d'elle étant totalement broyé. Par un seul coup n'avait atteint la femme Arcanin, alors que celle-ci gardait toujours ses pouvoirs désactivés. Harold n'avait pas été capable d'en mettre un seul. La silhouette s'arrêta sur place, se dissipant petit à petit. Harold voulait continuer de la haïr en cet instant, ainsi qu'à se haïr lui-même. Mais à chaque fois qu'il tentait de porter un coup qu'il savait possiblement fatal sur Sarah, son esprit était submergé. Il y avait cette fois où il était aller la voir, pour lui confier ses sentiments. Cette boule au ventre à l'idée d'être repoussé. La crainte de ne pas être aimé. L'euphorie, la joie, le soulagement, en découvrant que cette femme l'aimait aussi. Il y avait aussi ses souvenirs de ces instants d'intimité, où chacun des deux se sentait au Paradis, bercé dans ce court mais véritable instant de bonheur. Il y avait enfin cette fusion corporelle, où chacun comprenait l'autre plus et lui était bénéfique, que ce soit à l'entraînement ou ailleurs. Avec tout ça en tête... Comment pouvait-il lui ôter la vie ?

Harold commença à marcher vers Sarah. Sa silhouette se déformait de plus en plus. Il allait bientôt perdre le contrôle. Il allait bientôt disparaître.

-J'ai passé des années et des années à imaginer comment te faire payer, comment résoudre dramatiquement cette situation... Exactement comme à l'époque avec le dilemme du face à face entre un Dacota et un Kentucky... Et pourtant, en définitif, ils avaient raison... Je suis toujours incapable de te tuer malgré tout...

L'homme Tengalice perdait petit à petit ses forces, en même temps que sa haine et sa colère. Il concentra toutes les forces qu'il lui restait pour faire apparaître une main composée de branches et de débris, main qui s'approchait autant qu'elle pouvait de Sarah.

-Pourquoi... Est-ce que tout ce que je veux maintenant... Alors que la mort s'approche pour m'emporter... C'est être avec toi... Pour l'éternité... ?

-Sarah : Un briquet ? Tu sais, je peux utiliser mon feu naturel pour allumer mes clopes, tu sais... Et puis, je croyais que tu n'aimais pas que je fume ?

-Harold : Certes... Mais tu es sans cesse en train de le faire malgré tout, donc bon... Puis ce n,'est pas n'importe quel briquet, il a été créé pour pouvoir vivre des décennies entières. Comme ça, le jour où nos corps seront séparés par l'avenir et les combats...

L'ombre de vent commençait à se dessécher et à perdre forme, pointant faiblement son index vers la poche de la femme Arcanin. Comme pour lui indiquer quelque chose.

-... En l'utilisant, tu te souviendras toujours de moi. Nos esprits seront ensemble... A jamais...

La main disparut complètement. Toute trace de vie de Harold avait disparu. Tout ce que Sarah put ressentir alors... C'était son briquet faire un très léger et dernier "clic" dans sa poche.

» L'Archipel Du Dingue